La mort de la culture en France

L'art en danger plus que jamais en 2021 avec le covid-19

Il y a longtemps que je voulais écrire un article sur la mort de la culture en France. Mais je crois qu'en 2021, avec les annulations d'expositions, les lieux culturels fermés car considérés comme non-essentiels, il est plus que temps de le rédiger tant qu'il existe encore une étincelle d'art et de culture. Comme vous le verrez par la suite, cette " mort de la culture " n'est pas due au covid-19, elle existe depuis des décennies déjà, à différents niveaux et pour plusieurs raisons. Mais cette pandémie de coronavirus que nous vivons en 2021 risque bien de signer la mort définitive de ce qui fait la richesse et la créativité des artistes. Plus d'événements, peu de fonds, des créations qui, pour être mises en avant, doivent être centrées sur l'actualité et donc sur la pandémie (parfois optimistes, parfois terriblement réalistes) : pour l'artiste joyeux qui souhaite créer son concept, sa nouveauté, son interprétation du futur, l'ambiance actuelle est souvent un frein. Plusieurs personnes m'ont dit qu'avec la confinement et les événements mondiaux, j'avais sans doute pu créer de nouvelles oeuvres. Mais pour créer, il faut une ambiance propice, et celle de 2020 - 2021 n'est pas propice à tous les artistes. Bien sûr, les Enfoirés font leur concert en vidéo, les chanteurs français postent des stories sur instagram et on voit des expositions virtuelles de grands musées. Pour moi, ce sont des exemples de la culture qui se ment à elle-même. Il faut faire bonne figure en montrant des lieux communs pour faire croire que la culture survit - en tout cas la culture que l'on veut nous faire consommer. Et que l'on nous sert sur un plateau dégoulinant depuis le 1er confinement de 2020.

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Une tendance anti-culture de longue date

J'ai fait quelques recherches pour cet article sur la mort de la culture, et des intellectuels français et américains en parlaient depuis le début des années 2000. La disparition de l'idée de chef d'oeuvre, la mort du "dernier philosophe français" en la personne de Sartre... Les exemples sont nombreux et je vous laisse faire vos propres recherches pour le caractère "historique" de ce concept. A l'heure de la consommation de masse, du métro-boulot-dodo, qui va s'intéresser à des concepts compliqués, novateurs ou intemporels, qui font fonctionner nos méninges sans rapporter d'argent derrière ? C'est le mode de fonctionnement de la société qui est la nôtre depuis trois ou quatre décennies qui empoisonne et dénature la culture peu à peu. Paul Valéry en voyait déjà les prémisces à son époque. La télévision nous sert de plus en plus de non-culture (ou même d'anti-culture) de masse : télé réalité, chroniqueurs abêtissants, chanteurs sans véritable talent... ce qui est vrai également dans de plus en plus d'autres canaux de communication. Presse, radio, internet, aujourd'hui tout est tourné pour faire le buzz - souvenez-vous du sapin phallique à Paris qui a fait les gros titres pendant un temps. Peut-on vraiment parler de culture ?

La nouveauté pour la nouveauté (et l'argent)

Nous en venons donc à la "nouveauté" qui fait vendre, attire les foules mais sonne creux. En termes d'art et de culture (plus encore en France si l'on se souvient de ce qui fut notre culture lors des siècles passés), la nouveauté est censée tendre vers l'avenir, la découverte, l'accès à l'inconnu par l'emploi nouveau de méthodes anciennes. C'est ce qui m'est cher chez les surréalistes qui m'inspirent beaucoup ces dernières années. La nouveauté était là pour élargir les perceptions, les possibles, ouvrir de nouvelles voies d'expression et de vie pour que l'humanité se dépasse elle-même.

Mais saujourd'hui ? C'est apparemment Aya Nakamura qui représente le fleuron de notre culture française. L'humanité a trébuché et s'est estropié elle-même. Mais tout cela va dans le sens de notre société : c'est marrant, on tweete, ça buzz, les gens achètent et en redemandent. C'est simple, ça ne vole pas haut mais ça détend dans un monde grouillant de stress et d'informations démoralisantes. Et à la prochaine "nouveauté", on remplacera et oubliera cette chose creuse et sans substance qu'on prend pour de la culture. On nous vend de la non-culture, voire de l'anti-culture sous le masque de la culture. Un sort pire que la mort : l'oubli par l'évincement.

mort de la culture

La culture, esclave du patrimoine en France

Heureusement, il subsiste encore de vraies formes d'art et de culture en France. Hélas, elles servent quasiment toutes le patrimoine. J'ai démarché de nombreux musées et galeries dans l'espoir d'y exposer mes travaux qui, selon moi, représentaient une nouveauté. Je me suis heurté à des murs. Il faut exposer l'Histoire, le Patrimoine, de Grands Noms qui amènenent les touristes et reflètent la France (en tout cas les lumières de la culture française, qui datent hélas de plusieurs siècles). Et les bourses allouées aux artistes me direz-vous ? Elles soutiennent des projets liés au département ou à l'actualité. Ou bien elles sont dérisoires et servent de façade. Par exemple, l'une des villes que j'ai démarché allouait un prix pour la photographie, avec un site web et tout ! Bonne nouvelle me suis-je dit, et je suis allé surfer sur le web. Quelle ne fut pas ma déconvenue en découvrant un site qui n'avait pas été mis à jour depuis plus de dix ans et un prix en nature équivalent à moins de 300€ !

Je ne suis pas tendre mais le fait est trop souvent tu : la culture des musées et autres organismes subventionnés par les territoires cible purement et simplement le tourisme. C'est la culture chasse d'eau : combien de visiteurs passent 5 secondes devant une oeuvre pour la prendre en photo et passer à la suivante ? On attire les touristes par le patrimoine (artistique ou historique), ils sont contents, ils voient Tintin ou Astérix à Malbrouck et peuvent tranquillement rentrer chez eux en écoutant Maître Gimms avant de se poser devant Koh-Lanta. Le seul perdant, c'est l'artiste du 21e siècle qui a vraiment quelque chose à dire - et les possibles futurs de l'humanité écrasés sous le poids de cet esclavage culturel.

La pandémie de covid-19, le coup de grâce fait à la culture ?

Et voici où nous en sommes lorsque frappe la pandémie de covid-19. Les grands canaux de diffusion campent sur leurs bases juteuses, les espaces dynamiques exposent leurs artistes (souvent étrangers) qui buzzent et choquent. La fermeture des lieux "non essentiels", l'arrêt des événements et la prolifération des live virtuels donneront-elles le coup de grâce à la culture en France ? Malgré les efforts de petits artistes indépendants, je le crains de plus en plus. Pourtant, une lueur d'espoir filtre malgré ce contexte et même grâce à ce contexte. Lassés de cette anti-culture et avec plus de temps pour se rencentrer sur soi-même, peut-être pourrons-nous être assez nombreux à voir cette mise en danger de l'art et de la culture. Peut-être voudrons-nous davantage nous nourrir d'une nouveauté qui changera le monde et ceux que nous sommes. La fin de cette pandémie de covid-19 sera décisive. Si nous tendons vers des choses positives qui nous ouvrent plutôt que vers la facilité de cette culture faussement nouvelle ou du patrimoine sclérosé dans le passé, nous pourrons éveiller notre envie, notre besoin de culture véritable. Et par ce biais, la créer ou la soutenir.

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